De nombreuses recherches démontrent que la santé mentale des adolescents a dégringolé depuis plus de 10 ans. Les taux de dépression, d’anxiété, d’automutilation[1] et de suicide[2] ont drastiquement augmenté chez les jeunes entre 10 et 19 ans et cela dans le monde entier.
Comment en est-on arrivé là ?
Selon Jonathan Haidt, l’auteur du livre « The Anxious Generation », plusieurs facteurs expliquent cette situation. Tout d’abord, la parentalité a changé : dès les années 80, les parents ont commencé à surprotéger leurs enfants, les laissant de moins en moins seuls jouer dehors. En étant de plus en plus surveillés, les enfants de la génération Z ont commencé à passer de moins en moins de temps ensemble, à moins sortir et par conséquent à prendre moins de risques.
Dès 2010, un nouveau monde s’ouvre à eux, le monde virtuel, laissant définitivement de côté les jeux libres à l’extérieur. Les smartphones et les réseaux sociaux sont très vite adoptés par les jeunes. L’enfance basée sur le jeu est radicalement remplacée par une enfance guidée par les téléphones portables. La vie sociale des adolescents se passent désormais sur les apps, et cela sans grande supervision de la part des parents. Nous avons donc passé d’une parentalité surprotectrice dans le monde réel à une parentalité numérique quasi négligente ou impuissante, alors que les enfants passent de plus en plus de temps dans le monde digital.
Aujourd’hui, plus de 46% des adolescents disent être en ligne pratiquement en permanence. Cette hyperconnectivité a totalement transformé les comportements, les mentalités et surtout la santé mentale des jeunes.[3]
Pourquoi les adolescents sont-ils plus vulnérables psychologiquement ?
L’adolescence est une phase de vie pleine de transformations non seulement physiologiques, mais aussi psychologiques où l’enfant est en recherche d’identité, de groupe d’appartenance et de redéfinition de ses valeurs. Le cerveau des adolescents est toujours en développement, donc toujours plastique et très influençable. Si l’utilisation des réseaux sociaux peuvent rendre les adultes stressés et confus, les effets sur le cerveau d’un.e jeune sont bien plus dévastateurs car son cerveau est par nature plus vulnérable. Un adulte peut être déçu par le peu de « likes » reçus pour un post, mais il pourra facilement passer à autre chose, alors que pour une ado, c’est toute son estime de soi qui est en jeu. Les études montrent que les filles en souffrent plus que les garçons.
Pourquoi les filles ?
Chez les jeunes européens entre 11 et 15 ans, 19% des adolescentes disent être en détresse psychologique contre 9% des garçons.[4]
Lorsque les adolescentes ne vont pas bien, elles en parlent, cela se diffuse dans les réseaux sociaux et influence toute une communauté. Les garçons, eux, vont plutôt faire des activités avec d’autres sans en parler, ou simplement rester seuls en attendant que cela passe. Les adolescentes qui souffrent auront plus recours aux réseaux sociaux que les garçons. En y passant de plus en plus de temps, elles négligent le sport, leur sommeil, les interactions physiques et les moments dans la nature, les fondamentaux pour une vie saine et équilibrée. De plus, les filles, en utilisant davantage les réseaux que les garçons, auront plus tendance à se comparer et à s’exposer. Se comparer entre quelques copines c’est supportable, mais quand la comparaison se fait avec des milliers d’autres filles, ce n’est psychologiquement pas tenable.
Alors que faire pour changer cette trajectoire ?
Il existe des facteurs de protection pour éviter cette situation.
1) Retarder l’utilisation des réseaux sociaux.
2) Eduquer parents et ados aux risques des réseaux sociaux, intervenir dans les écoles.
3) S’assurer que les enfants ont une bonne estime et confiance en soi avant d’aller sur les réseaux.
4) Limiter le temps passé sur les réseaux.
5) Garder une posture ouverte, propice aux dialogues et au soutien.
6) S’assurer que les adolescents continuent à faire du sport, ne s’endorment pas avec leur smartphone, rencontrent leurs amis physiquement, poursuivent des activités créatives.
7) Proposer des défis dans la vraie vie : sortir de sa zone de confort, prendre un risque, puis féliciter les progrès et les succès.
[1] https://hbsc.org/data/
[2] https://www.economist.com/graphic-detail/2023/05/03/suicide-rates-for-girls-are-rising-are-smartphones-to-blame
[3] https://www.anxiousgeneration.com/research/the-evidence
[4] https://hbsc.org/data/