Mode Avion (Chronique par Declick)

Il vibre, se manifeste, s’impatiente. Avant même de poser le pied au sol, on l’a déjà en main. Il nous suit du matin au soir, discret mais omniprésent, utile mais captivant. Au creux de la main, il fait office de réveil, de guide, de pense-bête. Il rassure comme un doudou, écoute comme un vieil ami, informe comme un puit de savoir sans fin, connaît tout de nos habitudes. Il est un pont vers le monde entier à portée de pouce, accessible à tout moment, sans effort. Le smartphone, cet objet anodin du quotidien, devenu souverain. 

En cette période de reprise scolaire, le canton du Valais a décidé d’interdire le téléphone portable dans les écoles obligatoires. Objectifs : recentrer l’attention, libérer les esprits, protéger les liens sociaux. Une mesure forte, saluée par certains, débattue par d’autres. Mais qui invite, au fond, à une autre réflexion : et nous, adultes, où en sommes-nous avec notre propre usage ?

Si l’on demande aux enfants de lâcher leur téléphone à l’entrée des classes, peut-on réellement continuer à le consulter à chaque moment creux, entre deux phrases échangées avec un ami ou au beau milieu d’un repas de famille ? Peut-on parler de prévention sans introspection, d’imitation sans conscience de l’exemple que l’on veut montrer ?

Il ne s’agit pas de diaboliser les pratiques actuelles, ni même d’idéaliser une société sans écrans qui n’est plus depuis longtemps. Mais bien d’apprendre à doser, à choisir consciemment, à débrancher parfois. A relever la tête et regarder autour de soi, à s’ennuyer un peu, à être dans l’instant, simplement.

Le téléphone est un outil, aussi bien pensé que les applications qu’il renferme et donc parfois difficile à mettre en pause. L’interdiction en milieu scolaire est un signal, un cadre. Mais la prévention numérique, elle, commence ailleurs. Chez chacun d’entre nous, dans nos gestes, nos habitudes, notre qualité de présence à l’autre. 

Et peut-être qu’avant de demander aux jeunes de se déconnecter, on devrait s’y essayer nous aussi, juste pour voir. Prêts à tenter l’expérience ?